Les traitements naturels dans les vignobles : une alternative durable et prometteuse

12 mai 2025

Les enjeux environnementaux et économiques de la viticulture

La viticulture fait face à une multitude de défis : des maladies comme le mildiou et l’oïdium, aux ravages des ravageurs (cicadelles, cochylis, vers de la grappe...), en passant par les impacts du changement climatique. Tout ceci pousse les vignerons à protéger leurs vignes, mais souvent à un coût environnemental important.

Entre 2013 et 2019, la viticulture européenne a utilisé 3 à 5 % des terres agricoles, mais représentait environ 20 % de la consommation de produits phytosanitaires. Cette dépendance inquiète, car elle entraîne des conséquences directes sur la santé des sols, la biodiversité, la qualité de l’eau et même sur la santé humaine. Pas étonnant, donc, que de nombreuses initiatives en faveur d’une transition durable prennent de l’ampleur. Les traitements naturels, à travers leurs bienfaits et leurs limites, viennent aujourd’hui enrichir cette réflexion.






Qu’entend-on par “traitements naturels” ?

Avant d’entrer dans le détail, clarifions ce que l’on entend par traitements naturels dans les vignobles.

Les produits à base de plantes

  • Les extraits végétaux : certains végétaux, comme la prêle, l’ortie ou le saule, sont utilisés pour renforcer les défenses naturelles des vignes ou activer leur développement. Ces préparations, souvent appelées "purins", sont riches en composés bénéfiques comme la silice ou les tanins.
  • Les huiles essentielles : extraites de plantes comme le thym ou la menthe, elles présentent des propriétés antifongiques et répulsives intéressantes, bien qu’encore peu vulgarisées dans une pratique à grande échelle.

Les minéraux et substances naturelles

  • Le soufre et le cuivre : bien que controversés, ces substances naturelles restent largement utilisées en agriculture biologique. Néanmoins, leur impact environnemental (cuivre dans les sols, par exemple) doit être surveillé et réévalué.
  • La kaolinite et le talc : ces argiles créent une barrière physique protectrice sur les feuilles contre les ravageurs et les maladies.

Des agents biologiques

  • Les microorganismes : comme certaines souches de Bacillus ou de Trichoderma, qui colonisent la surface des feuilles ou des racines pour limiter les attaques pathogènes.
  • Les insectes auxiliaires : coccinelles pour lutter contre les pucerons, trichogrammes pour parasiter les œufs de vers de la grappe... Ces petits alliés jouent un rôle clé dans la régulation biologique.





Quels sont les bénéfices potentiels ?

À première vue, intégrer davantage de traitements naturels semble être une évidence pour répondre à la crise écologique actuelle. Voici pourquoi.

  • Réduction de la toxicité : contrairement aux produits chimiques de synthèse, les traitements naturels sont souvent moins nocifs pour les sols, les organismes aquatiques et les pollinisateurs. Par exemple, l’usage combiné de purins végétaux et d’auxiliaires naturels permet de restaurer les équilibres écologiques locaux.
  • Amélioration sociale : une viticulture durable répond aux attentes des consommateurs de plus en plus soucieux d’une agriculture respectueuse de l’environnement.
  • Valorisation des vignerons : adopter des solutions naturelles permet aux viticulteurs de se positionner en ambassadeurs de la qualité et de la durabilité.





Les obstacles et les limites : un complément, mais pas une solution miracle

Tester et adopter des traitements naturels n’est toutefois pas une solution sans zones d’ombre ou sans défis. Voici les principaux freins rencontrés par les vignerons.

Des effets variables selon les contextes

Un produit naturel qui fonctionne bien sur un vignoble au climat sec peut être inefficace dans des régions humides. Par exemple, le mildiou, favorisé par l’humidité, nécessite une protection efficace et réactive que les substituts naturels peinent parfois à reproduire.

Une réglementation encore floue

Les intrants naturels ne bénéficient pas toujours d’une reconnaissance ou d’une définition claire dans certaines législations. Ceci complique leur développement et leur adoption à grande échelle.

Une adaptation nécessaire des pratiques

L’utilisation d’agents naturels comme les extraits végétaux requiert des protocoles précis, souvent différents des traitements synthétiques. L’agriculteur doit donc se former et accepter de parfois expérimenter pour trouver la bonne solution.






L’avenir des traitements naturels : vers une viticulture régénérative ?

Bonne nouvelle, les progrès scientifiques et les initiatives vigneronnes ne cessent de grandir. La recherche autour des produits naturels connaît un essor notable. En 2020, l’Union européenne a lancé des projets tels qu’"Horizon Europe", dont le volet agriculture favorise l’innovation dans la gestion des sols et des maladies par des solutions plus durables.

Parallèlement, de nombreux domaines viticoles explorent des alternatives combinant agroécologie, réduction des entrants chimiques et régénération des écosystèmes. La viticulture biodynamique, par exemple, privilégie l’équilibre du sol et du vivant pour minimiser les besoins en traitements extérieurs. En Wallonie, plusieurs vignobles comme le Domaine du Chenoy ou le Château Bon Baron explorent cette voie prometteuse.






Une route encore longue, mais un avenir clair

Si les traitements naturels ne remplaceront pas demain les produits traditionnels à eux seuls, ils prennent une place croissante dans les discussions et dans les pratiques. Ils s’imposeront comme des outils complémentaires à intégrer dans des approches globales et diversifiées. L’enjeu n’est pas d’opposer nature à chimie, mais de repenser la manière dont on cultive nos terres pour produire des vins qui soient en harmonie avec leur époque, leur terroir et notre planète.

N’oublions pas qu’en tant que consommateurs, nos choix orientent les pratiques. Soutenir les vignerons engagés, privilégier les circuits courts et prendre le temps de découvrir les démarches derrière les bouteilles que nous consommons, c’est un pas vers une viticulture plus responsable et admirable.






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