Biodiversité : régression dans l’accord wallon final pour la PAC

Communiqué de presse de Natagora, WWF, IEW, GP et N&P

Le Gouvernement wallon vient d’adopter son plan PAC final. Malgré quatre mois de négociation avec la Commission européenne, le plan ne reçoit que des améliorations symboliques et techniques. Une mise en conformité réglementaire provoque une baisse d’ambition pour la biodiversité et grève les perspectives de transition de l’agriculture.

En janvier dernier, les 5 associations environnementales d’ImPAACte faisaient le constat d’un projet de Politique Agricole Commune (PAC) porté par des intentions louables, mais manquant de concrétisation budgétaire. En mai, nous révélions à la presse le contenu de la lettre de l’UE pour la Wallonie : elle jetait la lumière sur des insuffisances face aux crises de la biodiversité et du climat. Un plan final révisé a été validé ce vendredi 7 octobre par le Gouvernement.

Jeu de dupes

Une enquête publique dont les résultats ne seront jamais débattus, de multiples avis rendus sans aucun retour, une négociation avec la Commission Européenne à huis clos, une négociation muselée en gouvernement (8 jours pour réviser un document de 1000 pages)… Malgré une réglementation européenne claire sur le sujet, les autorités environnementales n’ont été impliquées que huit jours avant échéance. Telle est la recette d’un jeu de dupes politique qui conduit à négliger des enjeux cruciaux qui nous touchent tous : alimentation, santé, qualité de l’eau, biodiversité, climat, paysages, avenir des agriculteurs et modèles de production. 

Nouveaux garde-fous climatiques

Notons que la Commission a obtenu une amélioration symbolique sur les aides au bétail. D’ici 2027, les animaux d’élevages ruminants ne pourront plus être subsidiés au-delà de 4 gros bovins par ha. C’est un garde-fou pour la préservation des prairies et les émissions de gaz à effet de serre demandé par ImPAACte depuis plusieurs années, mais les niveaux définis défient encore toute logique environnementale. Nous y voyons un signal positif, mais l’enjeu sera de poursuivre la transition vers des niveaux de densité compatibles avec la préservation des prairies et de la ressource naturelle, soit 2 UGB/ha. 

De nouvelles mesures seront également mises en place pour réduire l’érosion et les coulées de boue dans nos campagnes, ce qui est vital dans la perspective de l’adaptation aux évènements climatiques extrêmes qui se multiplient. 

Menace sur l’élevage extensif à l’herbe

Si tout le monde s’accorde sur le nécessaire soutien du secteur élevage bovin en Wallonie, nous regrettons que les modalités restent incompatibles avec le développement durable. Effectivement, les subventions encouragent financièrement l’intensification des élevages bovins viandeux wallons, déjà parmi les plus intensifs d’Europe. Pire: la mesure “Autonomie fourragère” rémunérant des élevages favorables à la biodiversité voit ses aides divisées par deux. De surcroît, de nombreux éleveurs extensifs et pastoraux sont menacés par des modes de calcul défavorables qui risquent de les priver d’un soutien nécessaire à leur survie.

Une promesse de rétablir l’ambition pour la biodiversité… en 2024

Au-delà de quelques correctifs techniques en faveur de la biodiversité et de l’agriculture biologique, une mise en conformité réglementaire a provoqué une baisse des soutiens financiers qui étaient prévus pour les mesures agrienvironnementales (MAEC). Comble, malgré une lettre de l’Europe pointant un déficit d’ambition, les objectifs se voient encore réduits à l’issue de la négociation! Les MAEC sont les mesures les plus efficaces pour la biodiversité dans la PAC. Vu l’impossibilité d’apporter les corrections nécessaires en huit jours, le gouvernement s’est contenté de promettre de corriger le plan en 2024. 

Il est primordial de rétablir l’ambition pour la biodiversité dès que possible, de deux façons. D’une part, en recentrant l’écorégime sur des éléments de maillage écologique linéaires, dont les utilités sont multiples pour la biodiversité, l’adaptation au changement climatique et la moindre dépendance aux pesticides. Et d’autre part, en revalorisant les MAEC pour mieux préserver les habitats et espèces.

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